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Les Carnets du vicomte

Les Carnets du vicomte

Les cours de littérature n'étant pas réservés à des jeunes gens, et mes remarques sur la langue française nécessitant d'être partagées, j'ai cru bon de les transmettre par le biais de ces carnets.


Matinée Flaubert

Publié par Le vicomte sur 5 Septembre 2010, 09:34am

 

47. « Matinée Flaubert » Publié(e) : lun 04 fév 2008 12:56 CET

 

  • Lu dans la Correspondance de Flaubert (lettre à A. Le Poittevin, 26 mai 1845, p. 235) « Je suis devenu impuissant pour ces effluves magnifiques que j’ai trop senties bouillonner ». Les éditions de La Pléiade ne proposent aucune note quant à cette faute de grammaire que Flaubert n’est pas le seul à commettre, il est vrai. Grevisse cite notamment Verlaine, dans Sagesse.
  • Toujours chez Flaubert, dont la sûreté grammaticale m’a pourtant souvent été vantée, je trouve une multiplication de « j’ai été » à la place de « je suis allé », pourtant catalogué comme faute grossière. Dans de très rares cas, l’on peut considérer que la formule est juste dans la mesure où il dit qu’il était dans un endroit (exemple, p. 220, lettre du 2 avril 1845 « J’ai été aux Champs-Élysées (…) »), mais la plupart des autres occurrences constituent patemment des barbarismes : p. 227 « À Nice, je n’ai pas été au cimetière… », p. 228 « J’ai pris une barque et j’ai été jusqu’à l’entrée de la rade… ». Est-il devenu vieux jeu de relever les fautes chez les grands auteurs, et les célébrissimes éditions de La Pléiade n’ont-elles pas un service de correction ?
  • Il semble complètement dépassé de considérer comme fautif « d’ici 5 ou 6 jours », à la place « d’ici à 5 ou 6 jours » (Flaubert, ibid. p. 222). Pourtant, le second continue d’être analysable.
  • Un emploi métaphorique très joli d’un verbe oublié a attiré mon attention à la lettre du 2 avril 1845 (p. 220) « Nous aurions vraiment tort de (…) dérayer de notre vocation et de notre sympathie. » Ce verbe transitif direct signifie tracer le dernier sillon (celui qui distingue deux pâtures) ou (intransitif) cesser de tracer des sillons. l’emploi indirect est nouveau à cette date de même que la métaphore, très bien venue. Il n’est signalé ni dans Robert, ni dans Littré, ni dans le TLF qui signale le verbe intransitif dans le corps principal de l’article, et l’usage transitif direct (antonyme d’enrayer) dans la partie historique.
  • J’aurai peut-être des contradicteurs, mais « Nous sommes descendus la Saône en bateau à vapeur jusqu’à Lyon (…) » (p. 223, lettre du 15 avril 1845), n’est pas défendable. Le verbe descendre lorsqu’il présente une action se conjugue avec avoir. Il faudrait donc Nous avons descendu, mais, Nous sommes descendus à Lyon.
  • Autre faute notable, à moins d’un usage très spécial : « Le voyage que j’ai fait jusqu’ici, excellent sous le rapport matérielle, a été trop brute sous le rapport poétique pour désirer le prolonger plus loin. » (p. 226). Pour que le mot brute s’écrive ainsi, il faudrait que Flaubert se fût considéré comme une brute. Ce serait donc une dérivation impropre (substantif → adjectif). Cependant la formulation ne me paraît pas du tout défendable : brutal eût mieux convenu. Bien sûr, l'adjectif matérielle est mal accordé.
  • Autre barbarisme surprenant de la part de Flaubert : « (…) je suis revenu à terre et nous nous sommes en allés. » (p. 228). Il eût fallu évidemment nous nous en sommes allés.
  • La dernière faute est le fait de La Pléiade elle-même : « commer=çants » (p. 230) !
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